L’autonomie financière des femmes.
Portée par Jean Foyer, garde des Sceaux dans le gouvernement de Georges Pompidou, sous la présidence du général de Gaulle, le 13 juillet 1965, les députés français accordent aux femmes mariées l'autonomie financière que leur avait retirée par le Code Napoléonien.
Jusque-là, en se mariant, les femmes perdaient le droit de signer un chèque, d'ouvrir un compte courant ou parapher l'acte d'achat d'une maison. Toutes ces responsabilités étaient dévolues au mari, chef de famille en titre... Et si les femmes souhaitaient exercer une profession, elles devaient obtenir l’autorisation… du mari (sic)
La nouvelle loi constitue donc un progrès immense par rapport à la grande régression du XIXe siècle.
Un peu d’histoire
Le Siècle des Lumières (XVIIIe siècle - 1755-1789) offre aux femmes de la haute aristocratie et de la grande bourgeoisie l'occasion de briller comme jamais en société, mais il faut attendre la Révolution pour que s'améliore le statut des femmes.
De l'égalité juridique au divorce par consentement mutuel, droit de porter des armes, les femmes deviennent d'authentiques citoyennes... mais ne disposent pas du droit de vote.
En décembre 1789, les députés de l'Assemblée constituante ont catalogué les femmes parmi les citoyens « passifs », comme les hommes qui ne sont pas assujettis à l'impôt, elles sont donc exclues du droit de vote, ce qui en a fait en quelque sorte des « citoyennes sans citoyenneté ».
Certains citoyens reprochent aux députés de ne pas avoir mentionné les femmes dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen d'août 1789.
La dynamique Olympe de Gouges*, dédie à la reine Marie-Antoinette sa Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne, dans laquelle elle écrit : « La femme a le droit de monter à l'échafaud, elle doit avoir également le droit de monter à la tribune » (article 10). Considérée comme l’une des pionnières du féminisme, Olympe de Gouges revendique le droit de vote sans distinction de sexe.
Tout va basculer à partir de l'automne 1793, tant sous les gouvernements révolutionnaires que conservateurs ou bourgeois...
Dès l'automne 1793, les femmes se voient exclues des clubs révolutionnaires ! Avec la mise en place du règne de la Vertu par la Terreur, elles sont renvoyées dans l’espace domestique, seul domaine où on les tolère désormais.
Sous la Révolution, les femmes, Omniprésentes dans les manifestations poussent leurs hommes à agir, les Parisiennes assistent aux séances des assemblées révolutionnaires.
Dans le camp adverse, des femmes s’activent également en soutenant émigrés et prêtres réfractaires, voire en passant à l’action, comme Charlotte Corday, qui assassina Marat (13/7/1793) dans sa baignoire, d’un coup de couteau.
« J’ai vengé bien d'innocentes victimes, j'ai prévenu bien d'autres désastres », …« J’ai tué un homme pour en sauver cent mille » écrit-elle.
Malheureusement ce sont les hommes qui font les lois, les femmes doivent rester sous l’égide du chef de famille.
Malgré les protestations du marquis de Condorcet (dernier « philosophe » du Siècle des Lumières), poussé par son épouse Sophie, il publie en 1790 un traité Sur l'admission des femmes au droit de cité dans lequel il écrit avec une pointe d'ironie :
« Il serait difficile de prouver que les femmes sont incapables d'exercer les droits de cité. Pourquoi des êtres exposés à des grossesses et à des indispositions passagères ne pourraient-ils exercer des droits dont on n'a jamais envisagé priver les gens qui ont la goutte tous les hivers et qui s'enrhument aisément ? »
Une seule loi pour tous.
Déjà présente dans les esprits, l’inégalité homme-femme devient officielle avec l’arrivée de Bonaparte et la rédaction du Code civil (1804).
Dans le même temps, on multiplie les exigences pour rendre pratiquement impossible le divorce. On ferme aux femmes, autant que faire se peut l'accès à l'instruction et aux activités artistiques et littéraires.
Le 21 mars 1804 (30 ventôses de l'an XII), l'Ancien Droit est abrogé et le « Code Civil des Français » est promulgué. Tous les Français vivent désormais sous un même code de droit.
Ainsi prend fin un régime de lois disparates élaborées durant 1300 ans, depuis les lois barbares du temps des Mérovingiens jusqu'aux lois coutumières de l'Ancien Régime, en passant par les lois seigneuriales de la féodalité au début du deuxième millénaire.
Avec le Code Civil, la loi émane désormais du législateur seul, le juge n'ayant rien à faire qu'à l'appliquer. Elle régit tous les rapports sociaux, y compris le droit de la famille, indépendamment de toute considération morale, religieuse ou politique.
Après une lente émancipation amorcée... au Moyen Âge, ce nouveau code consacre une régression du statut de la femme. En effet, sous l'Ancien Régime, en l'absence de législation spécifique, la femme bénéficiait de droits plus ou moins étendus.
Désormais, le retour en faveur du droit romain et sans doute aussi les sentiments « machistes » du Premier Consul l'obligent à se soumettre à son père comme à son mari. La femme est considérée comme une mineure à vie, au même titre que les enfants ou les fous. Elle ne possède rien en propre et n'a pas d'autorité légale sur ses enfants.
Le code civil.
Le 21 mars 1804, tandis que le jeune duc d'Enghien expire dans les fossés de Vincennes, le Premier Consul Bonaparte promulgue le « Code Civil des Français ».
Le mérite de cet immense travail de compilation juridique revient pour l'essentiel à Cambacérès et aux hommes du Directoire qui ont gouverné la France avant le coup d'État de Napoléon Bonaparte.
Le « Code Civil des Français » s'inspire pour une bonne part des recueils de lois commandés 1300 ans plus tôt par l'empereur d'Orient Justinien. Il met fin aux particularismes locaux et à une certaine confusion juridique hérités de la tradition.
Napoléon Bonaparte perçoit la dimension révolutionnaire du texte, propre à bouleverser l'ordre ancien par sa cohérence, sa clarté, sa concision et sa simplicité. Devenu empereur et maître d'une bonne partie de l'Europe, il veille à faire appliquer partout son Code, rebaptisé en 1807 « Code Napoléon ».
L'empereur déchu dictera dans son exil de Sainte-Hélène : « Ma vraie gloire, ce n'est pas d'avoir gagné quarante batailles ; Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires. Ce que rien n'effacera, ce qui vivra éternellement, c'est mon Code Civil (...) Mon seul code par sa simplicité a fait plus de bien en France que toutes les lois qui m'ont précédé ».
Conformément à ses prévisions, le Code Civil est devenu le ciment de nombre de législations en Europe et dans le monde. L'essentiel de son contenu est encore en vigueur aujourd'hui en France. La moitié de ses articles sont restés inchangés depuis 1804 !
La partie qui a le plus évolué est celle qui est relative au droit de la famille.
En dépit du combat des premières militantes féministes et de la visibilité de quelques femmes de lettres, la révolution industrielle et l'apogée de l'Europe vont coïncider avec une régression sans pareille du statut social et politique des femmes, du moins dans l'Occident du dernier millénaire. Les premiers signes d'émancipation vont apparaître à la « Belle Époque », au début du XXe siècle, et se concrétiser après la Première Guerre mondiale...
1970. En juin 1970, une nouvelle loi supprimera la notion de chef de famille et consacrera l'égalité des époux en matière d'éducation parentale. En 1975 enfin, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, sera légalisé le divorce par consentement mutuel.
Sources diverses études ; Hérodote.
Photo : Hérodote
(* Marie Gouze, veuve Aubry, dite Olympe de Gouges née le 7 mai 1748 à Montauban, guillotinée le 3 novembre 1793 à Paris a laissé de nombreux écrits en faveur des droits civils et politiques des femmes et de l’abolition de l'esclavage des Noirs).