La marche du sel
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Depuis des années, Gandhi (Mohandas Karamchand), tente d'obtenir pour l'empire des Indes un statut d'autonomie.
Malgré la multiplication des manifestations non-violentes et les grèves de la faim, il n’obtient aucun résultat. Les membres de son parti, (le parti du Congrès), s'impatientent et menacent de déclencher une guerre en faveur de l'indépendance. Afin de ne pas être débordé par les extrémistes de son parti, Gandhi, avertit le vice-roi des Indes que sa prochaine campagne de désobéissance civile aura pour objectif l'indépendance.
Le 12 mars 1930, le Mahatma (son surnom, voulant dire « Grande âme, en langue hindie), entame une « marche du sel ». Il quitte son ashram (monastère) des environs d'Ahmedabad, au nord-ouest du pays, pour rejoindre le bord de l’océan Indien. Tout le long du parcours, des foules de pèlerins lui font une double haie d'honneur et tapissent le sol de pétales de fleurs. Un certain nombre se joignent au cortège.
Après avoir parcouru à pied 300 km, le cortège arrive le 6 avril à Jalalpur. Là, Gandhi, s’avance dans l’océan et recueille dans ses mains un peu de … sel. Geste dérisoire en soi, mais hautement symbolique. Par ce geste il encourage ses compatriotes à violer le monopole d'État sur la distribution du sel.
Comme la gabelle sous l’Ancien Régime, en France, ce monopole oblige tous les consommateurs indiens, y compris les plus pauvres, à payer un impôt sur le sel et leur interdit d'en récolter eux-mêmes.
Sur la plage, la foule, grossie de plusieurs milliers de sympathisants, imite le Mahatma et remplit des récipients d'eau salée. L'exemple se répand dans tout le pays... À Karachi comme à Bombay, les Indiens font évaporer l'eau et collectent le sel au vu des Anglais. Ces derniers jettent alors plus de 60 000 contrevenants en prison.
Fidèles aux recommandations de Gandhi, les Indiens, se gardent de résister. Le Mahatma lui-même est arrêté le 4 mai 1930. Ironique, il lance à ses geôliers : « Je vais enfin pouvoir dormir ! » Au bout de neuf mois de ce repos forcé, le vice-roi reconnaît son impuissance à imposer la loi britannique. Il libère tous les prisonniers, y compris le Mahatma, et accorde aux Indiens le droit de collecter eux-mêmes le sel.
Cette « marche du sel », est la première application concrète de sa doctrine de la non-violence, vers l’Indépendance.
Viscéralement attaché aux Indes britanniques de sa jeunesse, Winston Churchill, alors dans l'opposition parlementaire, ironise sur le « fakir séditieux qui grimpe à moitié nu les marches du palais du vice-roi ».
Le Premier ministre travailliste Ramsay MacDonald, plus perspicace, ouvre dès le 13 novembre 1930 à Londres, sous l'égide du roi George V, une première table ronde destinée à débattre d'une hypothétique indépendance de l'Inde.
En prison comme la plupart des chefs hindous du Congrès, Gandhi n'y assiste pas mais il est convié, l'année suivante, à une deuxième table ronde ou il est reçu en triomphe à Londres par les libéraux britanniques. Ces derniers se résignant à une prochaine indépendance de l'Inde, qui sera retardée par la Seconde Guerre mondiale et les dissensions entre hindous et musulmans.
Après la fin de seconde guerre mondiale, le 15 août 1947, l'Empire des Indes devient enfin indépendant mais au prix d'une sauvage guerre religieuse et d'une scission entre Inde et Pakistan. Gandhi y perd la vie.
Pour les Indiens, « La marche du sel » est l'équivalent de la « Tea Party » de Boston (révolte américaine contre le Parlement britannique en 1773), qui a conduit à l'indépendance des États-Unis.
Sources : Les amis d’Hérodote – L’Ouest clair (15/3/1930)