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15 août 2024 4 15 /08 /août /2024 18:07
Général Jean de Lattre de Tassigny

 

Le 15 août 1944, à 8h, sur dix-huit plages entre Toulon et Cannes, les Alliés débarquent en Provence. Ce débarquement après ceux de Sicile et de Normandie comporte pour la première fois un contingent important de Français.  Ce puissant corps d'armée aux côtés des troupes anglo-saxonnes est constitué de 260 000 Français sous le commandement du général Jean de Lattre de Tassigny. 

Le débarquement proprement dit se déroule assez bien, car une bonne partie des troupes allemandes ayant été rappelées vers le front de Normandie, ouvert deux mois plus tôt. Toutefois, la prise de Marseille et de Toulon va se heurter à une forte résistance de l'occupant.  

 

Baptisé Anvil (« Enclume ») puis Dragoon (« Dragon »), le débarquement de Provence avait été évoqué une première fois à la conférence de Casablanca, (14-24 janvier 1943), par les chefs alliés Roosevelt et Churchill, en même temps que l'opération Overlord.

Finalement, le débarquement de Provence a été décalé de plus de deux mois, les Alliés ne disposant pas d'assez de bateaux de transport pour mener de front les deux opérations.

Le débarquement de Provence est placé sous le commandement du général Alexander Patch, qui commande la VIIe Armée américaine, et pour la première fois intervient également une véritable armée française, sous les ordres du général Jean de Lattre de Tassigny (Ceux-ci avaient été représentés par un commando de 177 hommes le 6 juin 1944, avant que ne débarque la 2e DB du général Leclerc le 1er août suivant).

 

Les Français à l'honneur

Chef de guerre charismatique, mais distant, aux manières de grand aristocrate, de Lattre s'est attiré le surnom de « roi Jean ».

Ayant rompu avec le régime de Vichy après l'occupation de la « zone libre », il est emprisonné, il s’évade et rejoint la France Libre et le général de Gaulle à l'automne 1943. C'est ainsi qu'il prend le commandement en Algérie de l'armée B, qui deviendra en septembre 1944 la 1ère Armée française.

Forte de 260 000 hommes, elle est constituée de volontaires de la France Libre et surtout d'anciens soldats de l'armée d'armistice, qui étaient aux ordres de Vichy (général Weygand du temps où il était gouverneur général d’Algérie).

Elle recense également des conscrits d'Afrique du Nord, « pieds-noirs » et musulmans à part égale. Pendant que les Anglo-Saxons s'engouffreront dans la vallée du Rhône, c'est elle qui va conduire l'assaut contre Toulon et Marseille.

Au sein de l'armée B, les troupes du général Joseph de Goislard de Monsabert, dont en particulier la 3e division d'infanterie algérienne (DIA), occupent une place à part.

Constituées de goumiers algériens et de tabors marocains, des troupes d'élite réputées pour leur endurance (et leur férocité) qui se sont déjà illustrées dans les combats d'Italie et notamment à la bataille du Mont-Cassin.

Monsabert est un chef de guerre d'un abord simple, au tempérament opposé à celui de De Lattre, ce qui n'empêche pas les deux hommes de s'entendre à merveille. Surnommé le « gentilhomme gascon », il se signale toutefois par une piété à toute épreuve, qui n’a rien à voir avec les anciens mousquetaires...

Sous le commandement de De Lattre, l'armée B, qui réconcilie la France collaborationniste « de Vichy » et la France résistante « de Londres », va donc débarquer par vagues successives sur les côtes de Provence, aux côtés des Anglo-Saxons.

 

Une progression plus rapide que prévu

Comme en Normandie, les Alliés ont soigneusement préparé le débarquement. 

Le soir du 14 août, la BBC émet à l'intention de la Résistance intérieure les phrases codées qui indiquent l'imminence de l'opération : « Nancy a le torticolis »« Gaby va se coucher dans l'herbe »« Le chasseur est affamé ». Les résistants attaquent sans attendre les voies de communication pour empêcher tout repli de l'occupant.

 

Dans la nuit du 14 au 15 août 1944, neuf mille parachutistes anglo-saxons sous les ordres du général américain Robert T. Frederick, sont largués dans l'arrière-pays, entre les massifs des Maures et de l'Estérel. Ils assurent le contrôle des routes et marchent sans attendre vers Cannes.

Une solide couverture aérienne, permettra qu’à l’aube arrivent les premiers navires partis pour certains dès le 4 août, d'Afrique du Nord ou d'Italie du Sud, sans aucun ne soit coulé.               

En deux jours, 2200 bâtiments dont 85 navires de guerre amènent 115 000 hommes. L'assaut a été si rapide que les Allemands ont eu à peine le temps de réagir et l'on ne comptera que quelques dizaines de victimes parmi les Alliés.

Dès le 19 août 1944, les Allemands reçoivent de leur hiérarchie l'ordre de se replier, à l'exception des garnisons de Toulon et Marseille qui ont ordre de résister coûte que coûte.

 

Toulon et Marseille libérées

Les Américains du général Patch se dirigent à marches forcées vers la vallée du Rhône et font le 12 septembre 1944, à la hauteur de Dijon, leur jonction avec l'armée de Patton, venue de Normandie.

Pour les Français, le plus dur reste à faire.  À Toulon résistent dix-huit mille soldats de la Wehrmacht. Ils ne se rendront que le 26 août.  

À Marseille, la population se soulève dès le 19 août 1944, mais les Allemands, commandé par le général allemand Hans Schaeffer, qui tient la ville avec les 20 000 hommes de la 244e division, n'accepte pas de se rendre. Ils cesseront la résistance que le 28 août.

Les Français peuvent se féliciter d'avoir atteint leurs objectifs 13 jours après le débarquement alors que le commandement allié avait planifié 40 jours ! Dès le lendemain, le 29 août, le général de Monsabert, fervent catholique, fait célébrer un Te Deum devant la basilique de Notre-Dame de la Garde et salue la Vierge en ces termes : « C'est elle qui a tout fait ! ».

De Lattre, quant à lui, télégraphie au général de Gaulle un message plus prosaïque : « Aujourd'hui J+13, dans le secteur de mon armée, il ne reste plus un Allemand autre que mort ou captif. » 

Grâce à cette participation de l'armée française à la libération du continent, le général de Lattre ratifiera au nom de son pays la capitulation de l'Allemagne, le 8 mai 1945, à Berlin.

En attendant, son armée va poursuivre à bride abattue sa marche triomphale vers le Rhin. Rebaptisée 1ère Armée française le 1er septembre 1944, elle va au fil de son avancée accueillir dans ses rangs des combattants FFI et doubler ses effectifs jusqu'à atteindre 400 000 hommes. Dans le même temps, les soldats indigènes vont pour la plupart rentrer chez eux. L'Armée d'Afrique sera dès lors oubliée...

 

Sources documentaires :

Le débarquement de Provence a laissé peu de traces dans la littérature de la Seconde Guerre mondiale. Aussi cet article puise-t-il beaucoup dans l'excellent documentaire qu'a réalisé Christian Philibert pour FR3 : Provence, août 1944, l'autre débarquement (2014).

Texte André Lanéré (Les amis d’Hérodote)

 

 

 

 

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