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6 juin 2025 5 06 /06 /juin /2025 01:19

Strasbourg

Il faudrait plusieurs dizaines de pages pour parler de Strasbourg. Ville magnifique avec ses quartiers médiévaux, la Petite France, le siège du Parlement Européen et du Conseil de l’Europe. J’oublierai le bâtiment de l’ENA, mais pas la cathédrale avec son horloge astronomique. Sa renommée universelle depuis des siècles ne semble guère avoir diminué, compte tenu de la foule qui défile devant elle. L’horloge est un monument de l’art et de la science d’une extrême richesse. Elle est aussi une page de l’histoire de la cathédrale et de la ville Strasbourg à travers le temps.

 

L’horloge des trois rois

Aucun document ne permet d’identifier ceux qui imaginèrent et construisirent entre 1352 et 1354 cette première horloge de Notre-Dame de Strasbourg. Déjà astronomique, d’une hauteur de 12 mètres pour une largeur à la base de 4 mètres, était composée d’un calendrier, d’un astrolabe indiquant l’heure et les positions du soleil et de la lune. Équipée d’un automate avec les personnages des trois rois mages, Meldior, Balthazar et Gaspard, apparaissant à chaque fois que sonnaient les heures. Ils s’inclinaient l’un après l’autre devant la représentation de la Vierge Marie tenant l’enfant Jésus dans ses bras. Un coq, au sommet de la structure, battait des ailes et chantait toutes les heures, rappelant aux fidèles le reniement de l’apôtre Pierre après l’arrestation du Christ par les soldats romains. (Ce coq est aujourd’hui exposé au musée des Arts Décoratifs de Strasbourg).

Cette première horloge cessa de fonctionner vers le milieu du XVIème siècle. La ville décide de la remplacée. Les travaux débutent en 1547, alors que la cathédrale est affectée au culte protestant. Le chantier s’arrête en 1548, lorsque la cathédrale est rendue au culte catholique. De nouveau en 1558, l’édifice redevint protestant, mais il faut attendre 1571 pour que la construction de l’horloge soit reprise par Conrad de Dasypodius.

cadran extérieur de l'horloge

L’horloge de Dasypodius

Construite entre les années 1571 et 1574, sous la direction de Conrad Dasypodius (1531-1601), astronome et mathématicien, secondé par David Wolkenstein.

Cette horloge de grande taille avait une largeur de 8,60 mètres pour une hauteur de 18 mètres. Pourvue de belles figurines mobiles, elle indiquait le déplacement des planètes, annonçait les éclipses, les fêtes mobiles grâce à des tableaux et un calendrier, sur une période de 100 ans.

L’horloge de Dasypodius fonctionna pendant plus de 200 ans, jusqu’ la veille de la Révolution française. Elle resta arrêtée 50 ans, entre 1788 et 1838.

Considérée comme un chef d’œuvre de la Renaissance en Alsace, elle est qualifiée de « merveille du monde »,

 

L’horloge de Schwilgué

Un jour que le suisse de la cathédrale, après avoir présenté l’horloge immobile et muette de Dasypodius, concluait à ses visiteurs que personne ne pourrait la remettre en marche. Un jeune garçon dans le groupe des touristes lui lança : « Eh bien ! moi, je la ferai marcher ! ».

Ce jeune garçon, Jean-Baptiste Schwilgué (1776-1856), va consacrer son existence a acquérir en autodidacte toutes les connaissances nécessaires à cette entreprise.

Devenu ingénieur mécanicien, il fut enfin à 61 ans, chargé de la rénovation de l’horloge qu’il mena à bien de 1838 à 1842.

L'horloge astronomique Notre-Dame de Strasbourg

Une merveille de mécanique

Bien entendu, l’horloge astronomique de la cathédrale de Strasbourg donne l’heure ! mais cette merveille de mécanique horlogère comporte également un calendrier perpétuel, puisqu’elle indique la date du jour et un grand nombre d’informations supplémentaires. Elle renseigne sur le mouvement des astres dans le ciel : position des planètes dans le système solaire, phases de la lune, éclipses solaires et lunaires…

 

La mesure du temps et les indications astronomiques

1- L’heure

L’indication de l’heure est donnée par un cadran sur lequel les aiguilles blanches marquent l’heure officielle, alors que les aiguilles dorées indiquent l’heure moyenne locale (qui retarde d’une trentaine de minutes), d’après laquelle sont réglés les sonneries et les automates.

Le premier coup des quarts est frappé par un angelot, le second par l’un des quatre Âges : l’enfant, l’adolescent, l’adulte et le vieillard. Ceux-ci passent devant la Mort qui sonne les heures sans jamais s’arrêter, alors que les Âges, à l’instar des hommes, respectent le repos nocturne. Après la sonnerie de l’heure, le second angelot retourne son sablier.

La sonnerie de midi

La sonnerie de midi est suivie par le défilé des apôtres devant le Christ qu’ils saluent et qui bénit la foule après le passage du dernier apôtre. Pendant le défilé, par trois fois, le coq se met à chanter.

 

2- Le calendrier

  • Les jours

Les jours et l’astre correspond sont signalés sur les roues des divinités tutélaires, installées sur des chars que traînent les animaux qu’elles ont pour attribut. Se succèdent du dimanche au samedi : Apollon, Diane, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus et Saturne. Ce dernier, représenté en train de dévorer l’un de ses enfants, est aussi un symbole du temps qui détruit ce qu’il produit. La division du jour astronomique est rappelée par le face à face d’Apollon et de Diane qui incarnent respectivement la journée et la nuit. De sa flèche Apollon désigne sur le calendrier le jour courant.

  • L’année

L’année est décrite par un calendrier perpétuel, en forme d’anneau. Il indique les mois, les jours et leurs saints, les fêtes fixes et mobiles, ainsi que les lettres dominicales qui définissent les dimanches.

  • Le comput ecclésiastique

Le 31 décembre à minuit, le mécanisme du comput ecclésiastique se déclenche afin de mettre en place toutes les variables calendaires pour l’année à venir. C’est en se basant sur ces valeurs que le comput calcul automatiquement la date de Pâques. Il indique son millésime, sa place dans le cycle solaire (période de 28 ans au terme de laquelle les jours retombent sur les mêmes dates), son rang dans le cycle lunaire ou nombre d’or (période de 19 ans au bout de laquelle les phases de la lune se produisent aux mêmes jours), ainsi que celui dans l’indiction romaine (cycle de 15 ans utilisé dans les documents pontificaux), les lettres dominicales, les épactes (nombre de jours qui séparent la dernière nouvelle lune du 1er janvier) et la date de Pâques.

 

3- Les indications astronomiques

  • Le globe céleste

Il reproduit le mouvement de la sphère étoilée autour de la terre supposée immobile en son centre. Il comprend plus de 5000 étoiles et tourne en un jour sidéral (le jour sidéral correspondant à l’intervalle entre deux passages d’une même étoile au méridien, qui est d’environ 4 minutes plus court que le jour solaire moyen). Ce temps sidéral se lit sur un cadran annulaire fixée sur la sphère. En dessous de celle-ci, un rouage reproduit la giration pratiquement imperceptible de l’axe de la terre qui s’accomplit en 25806 ans.

  • Le temps apparent

Le temps apparent ou temps vrai est défini par la durée entre deux passages du soleil au méridien. Sur le cadran, deux aiguilles indiquent la marche apparente du soleil et de la lune autour de l’hémisphère nord placé au centre. Les aiguilles reproduisent également les éclipses. La longueur de l’aiguille lunaire varie automatiquement en fonction de la position de la lune (représentée par une petite boule qui, en tournant sur elle-même, décrit les phases lunaires). Sur le même cadran deux aiguilles marquent l’heure du lever et du coucher du soleil.

Un mécanisme des équations solaires et lunaires détermine l’irrégularité de la marche des deux aiguilles du système apparent conformément à la progression réelle des deux astres.

  • Le planétaire

Le planétaire montre la gravitation des six planètes visibles à l’œil : Mercure, Vénus, la terre accompagnée de de la lune, Mars, Jupiter, Saturne) autour du soleil central.

Les signes du zodiaque, tracés sur le pourtour, permettent de savoir dans quelles constellations se trouvent les planètes. Notons que les dimensions de celles-ci, ainsi que leurs distances et leurs mouvements sont restitués proportionnellement à la réalité avec une précision de l’ordre du cent- millionième !

  • Le globe lunaire

A moitié noirci et à moitié doré, montre les phases réelles de la lune en effectuant sa rotation lunaire de 29 jours, 12 heures et 44 minutes.

A l’heure de l’horloge atomique et du télescope spatial, l’horloge de Strasbourg, cette œuvre d’art propose une méditation sur le temps, tout en étant séduit par les jeux d’automates.

Un monument unique élevé par nos ancêtres à l’énigme du temps.

Un lieu à visiter sans oublier pour être dans la continuité les 13 cadrans solaires à l’extérieure de la cathédrale.  

Les 3 cadrans dits de Dasypodiud (transept sud)

 

 

Sources : L’horloge astronomique de R. Lehmi, l’horloge astronomique de Strasbourg, comité scientifique de l’horloge. Le comput édition A.F.A.H.A.

A suivre : Escapade en Alsace (5) : Le Struthof

 

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