Aujourd’hui 11 novembre, le Président de la République et Jean-François Copé, député-maire de Meaux ont inauguré le musée de la Grande Guerre de Meaux.
Ce devait être le 11-11-2011 à 11 h 11…. Ce fut à 15 h 30 !!
Quelques heures auparavant, pendant que dans les villes et villages de France ont rendait hommage aux poilus, à Paris était ravivée sous l’Arc de Triomphe la flamme du soldat inconnu.
Retour sur un cours d’histoire.
Le musée de la Grande Guerre vue de la route de Varreddes
Cette guerre, la « der des ders », laissant derrière elle 8 millions de morts (1,5 million pour la France) et 6 millions de mutilés, les anciens combattants vont imposer peu à peu le 11 novembre comme jour du souvenir en hommage aux soldats tombés pour la nation.
Il faudra toutefois attendre la loi du 24 octobre 1922 qui déclarera le 11 novembre fête nationale, et ce n’est que le 11 novembre 1923 que la flamme est pour la première fois allumée.
Bien avant la fin de la guerre, Monsieur Simon, Président du ‘Souvenir français’ (guerre 1870) émet en 1916 l’idée de mettre au Panthéon un soldat inconnu.
Les anciens combattants se mobilisent afin que ce soldat repose sous l’Arc de Triomphe et non au Panthéon.
Le 8 novembre 1920, la loi suivante est votée :
Article 1 : les honneurs du Panthéon seront rendus aux restes d’un des soldats non identifié au champ d’honneur au cours de la guerre 1914-1918. La translation des restes de ce soldat sera faite solennellement le 11 novembre 1920.
Art 2 : Le même jour, les restes du soldat inconnu seront inhumés sous l’Arc de Triomphe.
Restait alors à choisir la dépouille de ce soldat inconnu. Il fut décidé à partir des huit régions du front (Artois, Champagne, chemin des dames, Flandres, Ile de France, Lorraine, Somme, Verdun), d’exhumer dans ces secteurs et dans un endroit qui restera secret les corps de soldats non identifiés mais reconnus comme militaires ayant servi sous l’uniforme français.
Parmi les terrassiers qui fouillent la terre ce 8 novembre se trouve un jeune « deuxième classe» Auguste Thin. Sans le savoir il va entrer dans l’histoire.
En effet, Auguste Thin, n’avait pas au départ été choisi par ses supérieurs pour remplir ce rôle historique.
Il avait été prévu de désigner « un ancien poilu de deuxième classe, le plus méritant possible ». André Maginot, ministre des pensions, des primes et des allocations de guerre, grand mutilé disait : « Je demanderai à l’un de ces vaillants de sortir du rang et de désigner l’un de ces cercueils exposés ».
Le 9 novembre, les restes placés dans huit cercueils de chêne sont amenés dans la chapelle ardente dressée à la citadelle de Verdun. Les cercueils sont plusieurs fois changés de place dans cette casemate afin de préserver la provenance et l’anonymat.
Le 10 novembre, les cercueils recouverts du drapeau français sont alignés sur deux colonnes de quatre. Tout est prêt pour accueillir la délégation conduite par le ministre André Maginot… Sauf le soldat pressenti, ce héros du Chemin des dames et de Verdun qui vient de tomber malade. Il faut trouver un autre « vaillant ».
Cet autre « vaillant » sera Auguste Thin, qui ne se doute pas que son nom va entrer dans l’histoire. Auguste Thin fils d’un soldat disparu pendant la guerre, pupille de la Nation, s’engage le 3 janvier 1918 à l’âge de 19 ans. Fin août, Auguste est gazé dans les rangs du 234ème R.I. lors de la contre-attaque de Champagne. Ce 10 décembre il est à la caserne Niel de Verdun, en attente d’être libéré. Vers midi, Le colonel le convoque et lui annonce que c’est lui qui désignera cet après-midi le Soldat Inconnu.
A 15 heures le ministre André Maginot, tend un bouquet de fleurs au soldat Thin « vous le déposerez sur l’un des huit cercueils qui sont ici. Celui que vous choisirez sera le ‘Soldat Inconnu’ que le peuple de France accompagnera demain sous l’Arc de Triomphe’.
Le soldat Thin accompagné du ministre, de Monseigneur Ginisty, évêque de Verdun, du maire de Verdun et quelques autres personnalités se met en marche.
Partant de la droite, le cortège fait un tour puis longe les quatre cercueils de droite, tourne à gauche, et s’arrête devant le 6e. Auguste Thin pose son bouquet et se fige au garde-à-vous : le Soldat Inconnu est désigné.
Le cercueil transporté sur l’affût d’un canon 75, après un arrêt devant l’hôtel de ville, le temps d’un discours rejoint la gare de Verdun et part pour Paris… Sans Auguste Thin..
Le lendemain, 11 novembre 1920, après une escale au Panthéon, le cercueil du soldat inconnu est béni par l’archevêque de Paris, Monseigneur Louis-Ernest Dubois (il avait été évêque de Verdun en 1901), est déposé sous la voûte de l’Arc-de-Triomphe.
Sept tombes anonymes au cimetière du faubourg Pavé à Verdun, auquel le destin a refusé la gloire.
Le 28 janvier 1921, le soldat Inconnu est inhumé dans sa tombe. Sur la dalle sous laquelle repose ce héros, une inscription toute simple : ‘Ici, repose un Soldat Français mort pour la patrie’.
Lors d’un exposé quelques années après cet événement et dont le 132e bataillon cynophile de l’armée de Terre à Suippes possède l’enregistrement, Auguste Thin expliqua le pourquoi de son choix : ‘il me vint une pensée simple, appartenant au 6e corps, en additionnant les chiffres de mon régiment, le 132, c’est également le 6 que je retiens. Ma décision est prise, ce sera le 6ème cercueil que je rencontrerai’.
Le 11 novembre de chaque année revient au Président de la république le devoir d’honorer la mémoire du soldat inconnu, au maire de chaque commune celui d’honorer la mémoire des enfants du pays mort au combat.
En ce jour du 11 novembre et de l’inauguration du musée de la Grande Guerre, le Soldat Inconnu qui repose sous l’Arc-de-Triomphe est le lien de toute la nation qui a lutté pour sa liberté.
On peut alors songer au poème de la Légion Etrangère‘Qui sait si l’inconnu qui dort sous l’Arche n’est pas fils de France, non par le sang reçu mais par le sang versé’. (Pascal Bonetti, 1920, Le volontaire étranger)